Quelles solutions de prise en charge pour les déchets de très faible activité issus du démantèlement ?
Selon les prévisions des Essentiels de l’Inventaire national, le volume de déchets de très faible activité (TFA) devrait atteindre plus de 2 000 000 m3 à la fin du démantèlement du parc nucléaire français. Le Cires ne pourra pas absorber en totalité ces futurs déchets TFA qui seront produits après 2028. L’Andra étudie aujourd’hui des solutions pour anticiper leur gestion. Explications.
Les déchets TFA stockés au Cires sont principalement issus du démantèlement
Ouvert en 2003, le Centre industriel de regroupement, d’entreposage et de stockage (Cires) a accueilli, à fin décembre 2019, plus de 396 350 m3 de déchets de très faible activité (TFA), soit 61 % de sa capacité totale de stockage autorisé (650 000 m3).
Les déchets TFA sont principalement produits lors des opérations de démantèlement des installations nucléaires (gravats, déchets métalliques, terres, etc.). « Ce volume devrait atteindre 2 100 000 m3 à 2 300 000 m3 à la fin des opérations de démantèlement du parc nucléaire français, détaille Eric Lanès, chef du service solutions industrielles à l’Andra. On voit que, dans sa configuration actuelle, le Cires ne suffira pas. »
Zone de stockage des déchets TFA au Cires
Economiser le stockage, une ressource rare
Pour faire face à cette situation, l’Andra cherche des solutions pragmatiques. Tout en conservant le niveau de sûreté du Cires, l’Agence a déjà mené des opérations d’optimisation afin de stocker sur une même emprise un volume de déchets plus important. Une révision de la conception des alvéoles (approfondissement, raidissement et élargissement des pentes) et des dispositions de stockage (augmentation de la hauteur totale d’empilement des déchets) ont ainsi permis un gain de stockage de 56 % par rapport au concept initial. « Grâce à ces optimisations, nous avons aujourd’hui la possibilité technique de stocker 900 000 m3 de déchets sur le Cires, à superficie égale et à condition d’y être autorisés », poursuit Éric Lanès. À ce titre, l’Andra déposera une demande d’augmentation de la capacité du centre en 2022. Parallèlement, la création d’un nouveau centre est également à l’étude. « Nous anticipons sur les besoins futurs, en réfléchissant dès à présent à la possibilité de créer un deuxième centre de stockage de déchets TFA. »
De nouveaux enjeux à prendre en compte
Dans le contexte futur du démantèlement des installations nucléaires, se posent de nouvelles questions et en particulier celle du bilan environnemental global de la gestion de ces déchets. « Aujourd’hui nous gérons les déchets TFA, dans un principe de précaution, en les stockant sur un centre destiné à les recevoir. On sait pour autant que 30 à 50 % de ces déchets ne sont pas dangereux car ils ne présentent pas de trace de radioactivité ou à des niveaux de radioactivité extrêmement faibles », explique Patrice Torres, directeur des opérations industrielles de l’Andra.
Le stockage en un lieu unique de tous les déchets TFA est-il le mode de gestion le plus pertinent ? « Pour stocker ces déchets, il faut leur faire traverser une partie de la France, sur des camions ou des trains, alors qu’au regard de leur dangerosité on pourrait soit les stocker au plus près de là où on les démantèle, soit en revaloriser une partie », souligne Patrice Torres. Pour mieux prendre en compte ces enjeux environnementaux, l’Andra étudie des modes de gestion complémentaires et/ou alternatifs au stockage. Parmi les pistes envisagées, certaines sont déjà mises en œuvre comme la réduction des volumes grâce à des techniques de compactage, d’incinération ou de fusion. D’autres restent à développer telles que le stockage sur les sites en démantèlement ou encore le recyclage des matériaux dont l’activité est extrêmement faible voire inexistante et des modalités à mettre en œuvre pour assurer leur traçabilité.
La gestion des déchets de démantèlement était un des sujets du débat public qui s’est tenu en 2019 dans le cadre de la préparation de la cinquième édition du Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR). Les décisions du ministère de la transition écologique et solidaire et l’Autorité de sûreté nucléaire consécutives à ce débat ont été publiées le 21 février dernier.
En savoir plus : Que faire des déchets de démantèlement des centrales nucléaires ? L’éclairage en vidéo de Patrice Torres et Eric Lanès